Jour de gloire: Stefano Modena – Montréal 1991
Comme beaucoup d’autres avant et après lui, Stefano Modena pourrait figurer en bonne place dans le panthéon des espoirs décus de la Formule 1. Champion de F3 italienne en 1986, champion international de F3000 l’année suivante dès sa première saison dans la discipline les portes de la Formule 1 lui étaient grandes ouvertes.
Les débuts difficiles de Stefano Modena en F1
Il n’aura même pas à attendre la saison 1988 pour décrocher un baquet de titulaire. Brabham le recrute pour le Grand Prix d’Australie 1987 en remplacement de Riccardo Patrese. Une expérience peu glorieuse puisqu’il renonce en raison de crampes.
Malgré tout il est engagé par la modeste équipe Eurobrun en 1988 avant de retourner chez Brabham en 1989 et 90. Durant cette période il accumule les déconvenues à l’exception d’une magnifique troisième place à Monaco en 1989 derrière Ayrton Senna et Alain Prost.
L’espoir Tyrrell
Pour 1991, Ken Tyrrell cherche un remplaçant à Jean Alesi parti chez Ferrari et c’est Modena qui décroche ce baquet convoité. Au volant de la Tyrrell-Ford 019 à l’aérodynamique particulièrement réussie l’Avignonnais a réalisé des prouesses en 1990. Pour 1991 la monoplace conçue par Jean-Claude Migeot dispose en plus du V10 Honda champion du monde alors tous les espoirs sont permis.
Dès le premier Grand Prix de la saison à Phoenix il ne déçoit pas. Il décroche une belle quatrième place. Au Grand Prix suivant à Interlagos il est contraint à l’abandon en raison d’un problème de levier de vitesses. A Imola il se qualifie sixième. Après un départ canon il passe les 2/3 de la course en troisième position derrière les deux McLaren-Honda. Mais alors qu’un deuxième podium lui tend les bras il est trahi par sa transmission et met pied à terre à Acque Minerale.
La désillusion monégasque
A Monaco, un an après l’exploit de Jean Alesi il fait mieux que son prédécesseur en se qualifiant en première ligne aux côtés d’Ayrton Senna. En course il est le seul pilote capable de suivre le rythme du Brésilien avant de perdre beaucoup de temps en rattrapant les retardataires.
Beaucoup de pilotes le confondent avec Satoru Nakajima, son équipier nettement moins véloce que lui.
Toujours deuxième à la mi-course, son moteur explose à la sortie du tunnel entraînant également l’abandon de Riccardo Patrese qui sort de la piste en glissant sur l’huile.
Stefano Modena le héros de Montréal
C’est déçu par cette belle occasion manquée qu’il débarque à Montréal pour le cinquième Grand Prix de la saison. Sur ce circuit d’accélérations / freinages, les Tyrrell sont nettement moins à la fête qu’à Monaco. Stefano Modena se qualifie neuvième derrière les quatre top teams que sont Williams-Renault, McLaren-Honda, Ferrari et Benetton-Ford. Après une bagarre contre Andrea de Cesaris dont il sort vainqueur en début de course, Modena remonte peu à peu au classement. Beaucoup de pilotes devant lui abandonnent. Berger dès le quatrième tour, Moreno au dixième, Senna au vingt-cinquième puis les deux Ferrari de Prost et Alesi aux vingt-sept et trente-quatrième tour.
En lutte avec Patrese
Passée la mi-course, Stefano Modena est maintenant quatrième derrière un intouchable Nigel Mansell, l’autre Williams de Patrese et la Benetton de Piquet. C’est alors que Patrese est victime d’une crevaison et perd beaucoup de temps en rentrant au stand avec sa monoplace blessée.
A cet instant, la Tyrrell est en position de décrocher un podium. Mais le rêve est de courte durée lorsqu’elle est reprise par la Williams n°6 nettement plus rapide qu’elle. A quatre tours du drapeau à damiers l’Italien roule à un tour du leader qui s’est fait dédoubler par son équipier. Mais en délicatesse avec sa boite de vitesses, Patrese doit subitement ralentir la cadence.
Mansell, large leader avec 55 secondes d’avance sur Piquet lui reprend un tour puis c’est Modena qu’il voit grossir dans ses rétroviseurs. Impuissant, Patrese voit ses rêves de podium s’évanouir au soixante-septième tour. Dans le stand Tyrrell on exulte. Modena va effacer la terrible désillusion monégasque.
La bourde monumentale de Mansell
En tête Mansell continue sur un rythme d’enfer. Il lui reste moins de trois tours à boucler pour décrocher sa première victoire de la saison et briser la série de quatre succès de Senna. Plus qu’un tour. L’Anglais rétrograde pour négocier l’épingle. A-t-il effectué une mauvaise manoeuvre en saluant la foule comme certains observateurs le diront après coup? Toujours est-il que le moteur Renault s’éteint subitement. Mansell tente bien de se remettre au point mort pour relancer sa machine mais rien n’y fait et il doit abandonner à moins d’un kilomètre de l’arrivée.
Dans son langage toujours fleuri, Nelson Piquet dira à la conférence de presse d’après-course qu’il a « joui » en voyant la Williams se garer dans l’herbe. Ce sera la dernière victoire de sa carrière. Deuxième, Stefano Modena obtient son meilleur résultat en F1 devant Patrese qui sauve finalement un podium bien compromis.
Une fin de carrière anonyme
Le reste de la saison sera nettement moins glorieux pour Modena et Tyrrell qui se sépareront en fin d’année en n’ayant décroché qu’un seul point supplémentaire à Suzuka.
En 1992 Stefano Modena trouve refuge chez Jordan. Accablé par les ennuis il termine son premier Grand Prix de l’année à Spa-Francorchamps! Il marque son seul et unique point à Adélaïde, dernière manche de la saison. Ce sera aussi le dernier Grand Prix de sa carrière.
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