Les flops de la F1: le retour raté de Nigel Mansell

Après trois cuisants échecs en 1986, 1987 et 1991, Nigel Mansell décroche enfin en 1992, et avec la manière, le titre mondial après lequel il court depuis douze ans. A 39 ans, le plus célèbre des pilotes moustachus s’imagine que Frank Williams va sortir son carnet de chèques pour revaloriser son contrat, à la hauteur de son nouveau statut de champion du monde.

C’était bien mal connaître le directeur de l’équipe de Grove qui remporte cette partie de bluff en écartant purement et simplement l’Anglais au profit d’Alain Prost. En 1993, le Français remporte son quatrième et dernier titre tandis que Mansell s’exile en Indycar. Outre-Atlantique il réussit une reconversion parfaite en s’imposant à cinq reprises et en remportant le championnat alors qu’à 40 ans il fait figure de « Rookie ».

L’année suivante, la F1 subit l’immense traumatisme des accidents mortels de Roland Ratzenberger et d’Ayrton Senna qui avait remplacé Prost dans le baquet très convoité de la Williams-Renault.

A partir du Grand Prix d’Espagne, le débutant David Coulthard est désigné pour piloter la Williams n°2. Mais avec un plateau sans champion du monde, Bernie Ecclestone et Renault usent de toute leur influence pour faire revenir Mansell, seul pilote couronné encore en activité.

A Magny-Cours, il effectue son grand retour en F1 sous le mitraillage des photographes. Qualifié en première ligne à moins d’un dixième de Damon Hill il renonce après 45 tours de course en raison d’un problème de transmission. Après cette première pige il retourne finir sa saison aux Etats-Unis avant de revenir prendre part aux trois derniers Grands Prix de la saison. Il profitera de l’accrochage de Hill et Schumacher, alors en lutte pour le titre, pour imposer sa Williams lors du Grand Prix d’Australie. Il s’agit à ce jour de la dernière victoire d’un pilote quadragénaire.

En dépit de ce dernier succès, Frank Williams préfère miser sur la jeunesse de David Coulthard pour 1995. Mansell, 42 ans, n’a toujours pas l’intention de raccrocher le casque  et se rapproche alors de Ron Dennis pour signer un juteux contrat de 10 millions de dollars avec McLaren pour piloter aux côtés de Mika Häkkinen. La MP4/10 inaugure le partenariat de l’équipe britannique avec le motoriste Mercedes. Son design est particulièrement audacieux avec un mini-aileron sur le capot moteur et un nez extrêmement fin. Le vieux « Nige » qui n’a plus la ligne de ses 20 ans éprouve les pires difficultés à piloter dans ce cockpit si étroit. L’affaire tourne à la plaisanterie lorsqu’il renonce aux deux premiers Grands Prix de la saison, le temps pour McLaren de modifier la voiture. Alors que Mark Blundell a pris le relais dans la n°7, Mansell doit patienter jusqu’à Imola. Pour ce retour sur le théâtre des drames de 1994, il  se fait coller plus d’une seconde au tour par Häkkinen en qualifications. En course il termine à une anonyme dixième place à deux tours du vainqueur.

Deux semaines plus tard à Barcelone il se rapproche nettement du Finlandais sur la grille de départ. Au dix-septième tour de course, alors qu’il navigue dans les profondeurs du classement, il vient ranger sa voiture dans le garage Mercedes estimant sa tenue de route  trop aléatoire. Ainsi se terminera dans l’anonymat d’un abandon la carrière en F1 de Nigel Mansell. Après cette énième frasque, Ron Dennis et Norbert Haug ont perdu patience et n’ont pas hésité à limoger leur pilote avec effet immédiat. Coutumier des gaffes, le pilote à la moustache avait d’ores et déjà scellé son sort dès le dimanche matin en déclarant à Helmut Werner, alors président de Mercedes, et Jürgen Schrempp, président du directoire du groupe Daimler-Benz, que la McLaren-Mercedes MP4/10 était une vraie « poubelle » .

En décembre 1996, à plus de 43 ans il participe à une séance d’essai au volant d’une Jordan-Peugeot. S’estimant finalement trop vieux pour retrouver les grilles de départ, il renonce à poursuivre l’aventure en accord avec Eddie Jordan.

Avec 31 victoires en Grand Prix au volant des équipes les plus prestigieuses (Williams et Ferrari) Nigel Mansell aurait mérité une sortie plus honorable. Son caractère bourru et son gros appétit financier l’auront conduit à ce naufrage, mais quel pilote quand même !