Citroën GS birotor: histoire d’un fiasco industriel absolu

Par sa technologie singulière et sa faible diffusion la Citroën GS Birotor suscite de plus en plus l’intérêt des collectionneurs de Citroën classiques. Elle est surtout l’une des dernières représentantes du génie créatif de la marque avant son absorption par Peugeot. Arrivée au pire moment avec une valise de problèmes, sa fin fût dramatique.

Citroën GS birotor: Un pari technologique osé

Fidèle à sa réputation de constructeur de voitures innovant, Citroën travaille depuis le milieu des années 60 à la mise au point d’un moteur rotatif pour équiper sa GS. Sortie en 1970 c’est la première berline compacte de la firme aux chevrons. Après trois ans d’existence on décide de la faire monter en gamme. Et cela passe par une motorisation plus dynamique que le 4 cylindres à plat de 1 015 cm3 développant 56 ch seulement. Les ingénieurs effectuent des tests grandeur nature sur la Citroën M35, un véhicule hybride doté d’une suspension hydropneumatique dérivé de l’Ami 8.

Un moteur Wankel produit en coopération avec NSU

La marque allemande NSU s’intéresse aussi à la technologie de l’ingénieur Wankel. Mais son développement coûte cher. C’est ainsi que l’on créé la Comobil en 1964. Il s’agit d’une joint-venture qui permet aux deux constructeurs de se partager les coûts de R&D.

NSU est la première à dégainer en commercialisant dès 1967 la Ro80 mue par un moteur rotatif développant 115ch. Citroën et NSU construisent la Comotor SA au Luxembourg. Dans cette nouvelle usine on produit les moteurs à piston rotatif destinés aux deux marques partenaires.

NSU disparaît, les Français poursuivent seuls l’aventure du moteur Wankel

Hélas NSU est en grande difficulté et se fait absorber par Volkswagen en juin 1969. Le constructeur de Wolfsbourg arrête immédiatement les frais et abandonne la technologie Wankel. Citroën se retrouve seule à assumer les coûts de développement. Pour autant elle ne renonce pas et décide d’aller au bout du projet malgré ses propres difficultés financières.

La Citroën GS Birotor se dévoile au salon de Francfort 1973

C’est sous le nom de code de Citroën GZ qu’on présente au public la GS Birotor en octobre 1973. Mais elle arrive sur le marché 6 ans après la NSU Ro80.

La Citroën à moteur Wankel ne manquait pas de qualités

Equipée de son moteur à double rotor, la GS se trouve métamorphosée. Extérieurement on la dote d’ailes élargies pour accueillir des roues de 165 x 14. Le bouclier avant est aussi modifié. Une peinture beige ou brun métallisé souvent bi-ton accentue le côté cossu de l’auto.

L’intérieur n’est pas en reste avec une instrumentation complète et de confortables fauteuils avec appuie-tête intégrés.

Intérieur de la Citroën GS birotor

Sous le capot, le moteur équivalent à 1990 cm3 à double rotor est performant. Grâce à ses 107 ch din et son couple de 137 N.m, la GS avale le 0 à 100 en 13 secondes et atteint les 175 km/h. Des performances modestes vues d’aujourd’hui mais qui la plaçaient au niveau des Alfetta de l’époque.

Le moteur rotatif a aussi l’avantage de limiter les vibrations, d’être plus compact et de ne pas avoir beaucoup de pièces en rotations. Il n’a aussi pas besoin d’être vidangé.

Mais surtout de gros défauts qui entraîneront sa chute

La Citroën GS birotor a eu la malchance de sortir en plein choc pétrolier. Lorsque l’on sait que sa consommation gargantuesque oscillait entre les 12 et 20 litres aux 100 kms on comprend aisément qu’elle ait connu le même destin que sa grande soeur la SM Maserati.

Côté fiabilité c’était loin d’être parfait. La GS birotor a souffert d’incessants problèmes d’usure des segments d’étanchéité des rotors.

Enfin son prix de vente de près de 25000 francs la plaçait 10000 francs au-dessus d’une GS standard et au niveau de la gamme DS, certes vieillissante mais beaucoup plus statutaire.

Citroën vendra seulement 847 GS birotor

Plombé par l’acquisition de Maserati et les échecs de la SM et de la GS birotor, Citroën se fait racheter par Peugeot en 1974.

Plus pragmatique, la firme sochalienne décide de stopper la production de la GS birotor en 1975 et de rationaliser la production de voitures.

La CX qui vient de sortir ne verra jamais le jour avec le moteur Wankel de 1500 cm3 et de 160 ch qui lui était initialement promis.

Un passage au pilon en guise d’adieu

Aussi incroyable que cela puisse paraitre, l’immense majorité des GS birotor sera détruite par Citroën elle-même. Face aux insondables problèmes de fiabilité, la direction a tranché dans le vif. Elle propose de reprendre les modèles en circulation en échange d’une CX flambant neuve.

La plupart des clients accepteront ce deal sans la moindre hésitation.

La Citroën GS birotor aujourd’hui

On estime à une cinquantaine d’exemplaires seulement le nombre de GS birotor sauvées de la destruction. Malgré sa complexité technique elle bénéficie de l’engouement existant autour de la marque au double chevron. Son extrême rareté a eu pour effet de faire monter sa côte sur le marché de la collection.

Alors qu’une GS birotor en bon état s’échangeait contre 10000 euros environ en 2014, il est compliqué d’en trouver une à moins de 25000 euros moins de 10 ans plus tard.

45 ans après un enterrement en catimini la Citroën GS birotor a enfin retrouvé ses lettres de noblesse.